Les exportations baissent de 2 % quand elles ont augmenté de 8 % en Allemagne et en Espagne.
Loin de marquer une pause fiscale, le budget pour 2014 marque une nouvelle envolée des impôts : 10 milliards pour les ménages et 2,5 milliards pour les entreprises. Ils portent à 60 milliards, soit 3,3 % du PIB, les nouveaux prélèvements depuis 2012. Dans le domaine fiscal, les Français ne sont pas condamnés à la probation mais bien à une quadruple peine.
Première peine : la paupérisation. Le pouvoir d’achat diminue de plus de 1 % par an depuis l’élection de François Hollande du fait des prélèvements supplémentaires. La pauvreté touche 14,3 % de la population et 40 % des chômeurs. Le président prétendait faire payer les riches. La fiscalité confiscatoire mise en place sur les hauts revenus et les grandes fortunes a effectivement multiplié les exils et les abandons de nationalité française. Mais tous les Français sont touchés par le choc fiscal, comme en témoigne la hausse de la TVA. Avec un ciblage spécifique des classes moyennes et des familles. L’impôt est désormais proportionnel au nombre d’enfants. L’avenir dira si la vitalité démographique de la France, qui était l’un de ses rares atouts, résiste à ce tir de barrage fiscal.
Deuxième peine : la dégradation accélérée des services publics. Alors que la dépense publique atteint 57 % du PIB et que plus du quart de l’emploi relève de la fonction publique, la qualité des services rendus par les administrations s’effondre. C’est particulièrement vrai de la sécurité, qui constitue le premier des droits de l’homme. L’explosion de l’insécurité et de la violence, dont Manuel Valls ne nie plus la réalité, n’épargne aucun citoyen ni aucun territoire : elle frappe les classes moyennes, les campagnes, les établissements scolaires, les hôpitaux… La paix civile n’existe plus dans un pays où l’État a perdu le contrôle, de manière sans doute irréversible, de zones et de populations entières, à l’exemple du nord de Paris, de Marseille ou de la Corse. De même, toutes les enquêtes soulignent la chute des performances du système de santé ou de l’éducation, qui, en Europe, occupe désormais la queue du peloton. Plus les impôts augmentent, moins l’État fonctionne.
Troisième peine : le blocage de la croissance et de l’emploi. François Hollande répète en boucle – peut-être pour s’en persuader – que la crise est finie et que la reprise est engagée. C’est vrai aux États-Unis, en Allemagne ou au Royaume-Uni. C’est faux en France. Notre pays est sorti de la récession mais entre dans une longue stagnation. En cassant tous les ressorts de l’activité, le choc fiscal nous coupe de la reprise qui se dessine dans les pays développés. Les flux économiques – c’est-à-dire la croissance – sont bloqués. Les stocks – c’est-à-dire les patrimoines – diminuent avec les prélèvements confiscatoires sur le capital. La consommation recule sous l’effet de la diminution du pouvoir d’achat et de l’augmentation du chômage, qui touche 10,9 % de la population active. La production reste inférieure de 2 % à son niveau d’avant la crise et jusqu’à 20 % dans l’industrie. Les exportations baissent de 2 % quand elles ont augmenté de 8 % en Allemagne et en Espagne. L’investissement se replie de 3 % en raison de la contraction historique des marges des entreprises (28 % de la valeur ajoutée), dont les charges sont deux fois supérieures à celles de leurs concurrentes allemandes.
Quatrième peine : la poursuite des déficits et du surendettement publics. Au Royaume-Uni, la politique d’austérité a permis de réduire fortement les déficits. Il en va de même aux États-Unis, où les coupes automatiques de dépenses ont, cette année, divisé par deux le déficit budgétaire. Il n’en est rien en France. La seule justification du choc fiscal était de ramener le déficit public à 3 % du PIB en 2013 ; il sera de 4,1 % et atteindra au moins 3,6 % l’an prochain, ce qui portera la dette à 95 % du PIB. La récession, la multiplication des faillites d’entreprises, l’envolée du chômage, la paupérisation des Français n’ont servi à rien. Les finances du pays n’ont nullement été rétablies. Et ce pour une raison simple : la poursuite des dépenses. François Hollande disait vouloir désendetter l’État, il s’est contenté d’augmenter le nombre des fonctionnaires – à commencer par l’embauche de 60 000 professeurs totalement inutiles, comme l’a montré la Cour des comptes – et de relancer la course folle des transferts sociaux : retour partiel à la retraite à 60 ans, pénibilité, hausse des minima sociaux et de la prime pour l’emploi, allocation de rentrée scolaire, emplois aidés… La France ne génère plus ni croissance, ni investissement, ni emplois marchands ; elle crée des impôts, des dépenses et des dettes.
Le choc fiscal de François Hollande constitue la plus lourde erreur de politique économique depuis la relance de 1981. Les séquelles en seront durables sur la croissance potentielle, qui se trouve pratiquement ramenée à zéro par la paupérisation des Français, par le rétrécissement de l’appareil de production, par la régression de l’investissement et le blocage de l’innovation, par la nouvelle vague de chômeurs structurels. Au principe de la débâcle, on trouve une conception biaisée de l’impôt. Il relève des moyens et doit être un instrument au service de la couverture des charges publiques. Il a été érigé en fin, en objectif politique et moral, pour placer les Français en situation d’égalité dans la pauvreté et pour les enchaîner à la ruine de l’État.
(Chronique parue dans Le Point du 19 septembre 2013)