La démagogie et la faiblesse de François Hollande mettent désormais en péril l’alternance et l’ultime chance de redresser de manière pacifique et démocratique notre pays.
Le chaos, c’est maintenant. Tandis que François Hollande annonce son mantra qui veut que « ça va mieux », 66 millions de Français constatent que rien ne va plus. La crise nationale accélère et change de nature : le décrochage économique se poursuit, mais il est désormais éclipsé par la violence sociale et politique.
La modernisation du marché du travail portée à l’origine par la loi El Khomri a été vidée de tout contenu. Le texte se limite à créer une nouvelle usine à gaz pour les entreprises avec le compte personnel d’activité. Simultanément, une minorité d’activistes bloque l’économie, compromettant sa timide reprise, et met à sac le centre des grandes villes, achevant de ruiner l’image de la France en Europe et dans le monde. Au moment où la nation affronte une menace terroriste sans précédent, l’État ne répond plus. L’ordre public s’effondre. La République abdique au profit de la loi du plus violent. Or il est vain de prétendre se dresser face à l’État islamique d’Abou Bakr al-Baghdadi quand on se couche devant la CGT de Philippe Martinez.
Sous la précaire embellie de la conjoncture, la descente en vrille de l’économie française se poursuit. Les faillites augmentent, réduisant la base productive. Les projets d’investissements étrangers régressent. Le tourisme s’effondre avec la peur des attentats et l’extension des désordres. L’industrie se liquéfie, avec pour nouvel avatar la fusion-délocalisation à Londres de Technip, venant après les départs de Lafarge, Alcatel, Alstom et Norbert Dentressangle, ou la déconfiture de Vallourec. L’exil des entreprises, des contribuables fortunés, des entrepreneurs et des cerveaux s’emballe.
La nouveauté vient de la désintégration de la société française et des institutions. La France est le pays européen le plus touché par l’islamisme radical, avec la présence de quelque 2 000 combattants en Syrie et l’emprise croissante du djihad sur une partie de la jeunesse. Dans le même temps, elle voit exploser le désespoir et les violences émanant de nombreux secteurs, des agriculteurs aux ouvriers en passant par les étudiants. Le choc fiscal, l’envolée du chômage et le ciblage systématique des familles ont dévasté les classes moyennes, ouvrant un vaste espace au populisme.
La démagogie et la faiblesse de François Hollande, après avoir tué dans l’œuf son quinquennat, mettent désormais en péril l’alternance et l’ultime chance de redresser de manière pacifique et démocratique notre pays. L’épreuve de force engagée par la CGT vise en effet aussi à préempter 2017, en interdisant toute modernisation. Simultanément, le président multiplie les dépenses clientélistes qui engageront son successeur. Plus de 5 milliards ont été distribués depuis le début de l’année aux fonctionnaires, aux enseignants, aux jeunes, aux intermittents du spectacle et aux élus locaux. L’objectif de limiter le déficit à 3 % en 2017 est d’ores et déjà caduc. Pis, les engagements pris pour les exercices futurs, à partir de 2017, s’élèvent à plus de 10 milliards d’euros par an, auxquels s’ajouteront les coûts vertigineux de la recapitalisation des entreprises publiques de l’énergie et des transports ainsi que les concessions de l’État face aux syndicats de la SNCF, d’EDF ou d’Air France.
Sous le portrait de Louis-Philippe tracé par Tocqueville dans ses Souvenirs se dessinent les traits de François Hollande : « Il était rangé dans sa conduite, simple dans ses habitudes, mesuré dans ses goûts ; tempéré dans tous ses procédés sinon dans ses désirs, humain sans être sensible, cupide et doux (…). Sa conversation prolixe, diffuse, originale, triviale, anecdotière, pleine de petits faits, de sel et de sens, procurait tout l’agrément qu’on peut trouver dans les plaisirs de l’intelligence quand la délicatesse et l’élévation n’y sont point. Son esprit était distingué, mais resserré et gêné par le peu de hauteur et d’étendue de son âme. Éclairé, fin, souple et tenace ; tourné seulement vers l’utile et rempli d’un mépris si profond pour la vérité et d’une si grande incrédulité dans la vertu que ses lumières en étaient obscurcies, et que non seulement il ne voyait pas la beauté que montrent toujours le vrai et l’honnête, mais qu’il ne comprenait plus l’utilité qu’ils ont souvent ; connaissant profondément les hommes mais par leurs vices seulement ; incrédule en matière de religion comme le XVIIIe siècle et sceptique en politique comme le XIXe; sans croyance lui-même ; n’ayant nulle foi dans celle des autres ; d’une ambition qui n’était bornée que par la prudence, qui jamais ne se rassasiait ni ne s’emportait et qui toujours se tenait près de terre. » Nous sommes en 1848 !
(Chronique parue dans Le Figaro du 06 juin 2016)