Fort du spectaculaire redressement économique du pays, le président devra, malgré son triomphe aux élections de mi-mandat, conjurer sa tentation autoritaire sur le plan politique.

Javier Milei, avec son parti La Libertad Avanza, a remporté en Argentine lors des élections législatives partielles du 26 octobre une victoire aussi éclatante qu’inattendue. Comme lors du scrutin présidentiel de 2023, il a donné tort aux pronostics, aux sondages et à la fatalité qui fait des élections de mi-mandat un piège pour le parti au pouvoir en gagnant 16 des 24 circonscriptions et 41 % des 127 sièges renouvelés.
Ces élections intervenaient à un moment crucial. Après son spectaculaire redressement financier, l’économie argentine reste dans l’attente d’un nouveau modèle de développement qui ne soit plus fondé sur l’inflation, la dépense et la dette publiques. Ceci implique notamment la transformation du marché du travail, la refonte de la fiscalité et le démantèlement à haut risque du contrôle des changes et des capitaux.
Or si Javier Milei a réussi le tour de force politique de réaliser l’assainissement financier sans soutien parlementaire, puisqu’il ne disposait que de 6 sénateurs sur 72 et 38 députés sur les 257 qui composent la Chambre basse, il lui était impossible de poursuivre la transformation de l’Argentine sans l’appui du Parlement. C’est désormais le cas, même s’il devra nouer des alliances.
Thérapie de choc
La victoire sans appel de Javier Milei est d’autant plus remarquable que les électeurs ont choisi de pondérer ses excès qui l’ont régulièrement poussé à la faute, son autoritarisme et l’implication de sa sœur, Karina Milei, qui est aussi le chef de son administration et son gourou, dans un scandale de corruption touchant l’Agence nationale du handicap.
À l’inverse, la campagne nationaliste conduite par les populistes de Cristina Kirchner a fait long feu.
Sans aucun projet, elle se limitait à la dénonciation des ingérences de Donald Trump, qui avait conditionné la conclusion d’un swap de 20 milliards de dollars pour réassurer le peso au succès de Milei et de son parti. Or le soutien résolu des États-Unis a été plutôt perçu favorablement dans un pays dont la monnaie, l’économie et l’enseignement en dépendent fortement.
Les deux raisons qui expliquent le triomphe imprévu de Javier Milei restent le miracle économique produit par sa thérapie de choc et le refus des Argentins de retomber dans le populisme péroniste, dont ils mesurent combien la sortie est aussi virale que douloureuse.
Sous la conduite de Javier Milei, l’Argentine s’est engagée dans un ajustement financier d’une ampleur et d’une rapidité qui dépasse les politiques mises en œuvre par le général de Gaulle en France 1958 ou Margaret Thatcher au Royaume-Uni en 1979 et qui ne trouve d’équivalent que dans celui subi par la Grèce dans les années 2010 sous la tutelle de la troïka.
Les dépenses publiques ont été diminuées de 30 % en quelques mois, avec des coupes claires dans les retraites, les salaires du secteur public, les subventions à l’énergie et aux transports, les aides sociales. Simultanément, des privatisations massives ont été engagées et une dévaluation de 50 % du peso a été réalisée. Avec des résultats spectaculaires.
L’inflation a été ramenée de 270 % à 23 % par an, ce qui a libéré les Argentins d’un enfer quotidien. Le déficit public a été éradiqué, passant de 5,4 % du PIB à un excédent de 0,4 % du PIB en 2025. La dette publique a été diminuée de 88 à 78 % du PIB, réduisant la prime de risque. Plus de 20 milliards de dollars de capitaux ont été rapatriés et 50 milliards d’investissements étrangers réalisés.
Après une récession de 3,5 % en 2024, la croissance a rebondi à 5,5 % en 2025 et est attendue à 5 % en 2026. Les exportations de produits agricoles, de matières premières et d’énergie ont fortement progressé. La pauvreté a été réduite de 53 % à 29 % de la population, permettant à 1,7 million d’enfants d’échapper à la misère.
La suppression du contrôle des loyers a permis d’augmenter l’offre locative de 30 % et de diminuer leur montant de 20 %.
[…]
(Chronique parue dans Le Point du 7 novembre 2025.)
Lire la suite de l’éditorial sur lepoint.fr
![]()
