Le chômage est un mal qui ronge la France. Mais il n’est pas une fatalité.
Le chômage est un cancer qui ronge l’économie et la société françaises depuis près de quatre décennies. Il réduit la croissance potentielle, contribuant à expliquer la stagnation de l’activité et le déclassement de la France, ravalée au 6e rang mondial. Il provoque la baisse du niveau de vie et la paupérisation des Français, dont la richesse par habitant est inférieure de 6 % à la moyenne des pays développés. Il fournit le terreau de l’islamisme qui endoctrine une jeunesse privée d’avenir.
Le chômage français présente un caractère critique. Tous les voyants sont au rouge. Loin de s’inverser, la courbe du chômage ne cesse d’accélérer avec 5,5 millions d’inscrits à Pôle emploi, dont 2,23 millions depuis plus d’un an. Dans le même temps, le taux d’emploi reste très faible (64 %) et les destructions de postes de travail s’emballent, ramenant les emplois privés à 15,8 millions, soit leur niveau de 2004.
Le chômage français constitue aussi une exception. La France est le seul grand pays développé à n’avoir jamais rétabli le plein-emploi depuis les chocs pétroliers des années 1970. La France est également seule – avec l’Italie – à voir le chômage continuer à augmenter, pour frapper 11 % de la population active à la fin 2015.
Le chômage n’est pourtant pas une fatalité. En témoigne le rétablissement du plein-emploi aux États-Unis, qui ont créé 3 millions d’emplois en 2014, ce qui a permis de ramener l’inemploi à 5,6 % des actifs, mais aussi en Allemagne et au Royaume-Uni où le taux de chômage a chuté à 4,9 % et 5,9 %. La zone euro, pour sa part, a vu le chômage diminuer de 12,1 % à 11,5 % de la population active en 2014. Même les pays les plus touchés par la crise ont connu, grâce aux réformes entreprises, une amélioration sensible du marché du travail, à l’image de l’Espagne où le taux de chômage est revenu de 26 % à 23 %.
Le marché du travail français est structurellement malade. Sa crise n’est pas liée à la mondialisation ou à l’Europe mais à sa rigidité, à sa segmentation et à ses surcoûts. Dès lors que l’Italie va bénéficier des effets du Jobs Act lancé par Matteo Renzi, la France restera le seul pays développé dont le marché du travail n’aura pas été réformé. Elle deviendra la variable d’ajustement de la reprise, cumulant hausse du chômage, stagnation de l’activité, chute de la compétitivité, envolée de la dette publique.
La mobilisation des citoyens et l’esprit de responsabilité des dirigeants doivent être mis au service du retour au plein-emploi autour de cinq principes. Ce sont les entreprises qui créent l’emploi durable. Il est donc vital d’interrompre leur euthanasie avec le niveau record des faillites (63 000) qui résultent de l’effondrement de leurs marges. Le CICE est insuffisant, qui ne transfère que 11 milliards vers les entreprises et ne compense pas les 35 milliards de prélèvements mis à leur charge depuis 2010. La baisse des impôts et des charges sur le travail doit être intégralement financée par la baisse des dépenses publiques. Celle-ci passe par la diminution du nombre des agents publics, qui a augmenté de 92 500 en 2013 alors que chacun d’eux représente pour les finances publiques un engagement moyen de 2,5 millions d’euros.
Le marché du travail français est désormais le plus rigide du monde développé en termes de coûts et d’ajustements des effectifs. La durée du travail doit être relevée à 39 heures pour annihiler l’effet destructeur sur la compétitivité des 35 heures qui ont augmenté le coût du travail de 17,1 % et durci le chômage structurel. L’hyper-protection des uns ayant pour contrepartie la précarité des autres, il est vital d’assouplir les conditions d’embauche et de licenciement des CDI tout en confortant les droits à la formation des CDD et des intérimaires. Les emplois publics doivent être régis par des contrats de travail de droit commun à la seule exception des fonctions régaliennes (police, justice, diplomatie, défense).
Tout vaut mieux que le chômage. La modération salariale est justifiée. Les CDD, l’intérim, les stages, l’apprentissage jouent un rôle clé dans l’insertion sur le marché du travail. Leur régime doit être simplifié et leur durée allongée. Simultanément, l’assurance-chômage doit être réformée et les allocations devenir dégressives tant pour inciter au retour à l’emploi que pour limiter le déficit qui atteint 19 milliards d’euros.
Dans l’économie de la connaissance, le capital humain est le nerf de la guerre économique. Il est insupportable d’investir 6,1 % du PIB dans un système éducatif qui rejette chaque année un jeune sur cinq sans qu’il sache lire, écrire et compter. L’exil massif des talents et des cerveaux provoqué par une fiscalité confiscatoire, par une réglementation malthusienne, par la condamnation du risque et de la réussite, est suicidaire. Ce sont les entrepreneurs, et non pas les aides ou les emplois publics, qui constituent le véritable antidote au chômage et le levier du retour au plein-emploi.
(Chronique parue dans Le Figaro du 19 janvier 2015)