Pologne, Roumanie… Poutine exploite le blanc-seing qu’il a reçu de Trump et de Xi pour l’extension de la guerre.
Et ce sans véritable riposte de la part de l’Otan.
Mercredi 10 septembre, la Russie a lancé une vague de 21 drones dans la profondeur du territoire de la Pologne, dont plusieurs visaient l’une des principales bases de l’Otan qui sert de plaque tournante pour le soutien de l’Ukraine.
Cette attaque accompagnait des frappes massives de 450 drones sur la partie occidentale de l’Ukraine ainsi que le début des manœuvres Zapad 2025 qui mobilisent plus de 13 000 hommes en Biélorussie – rappelant le sinistre précédent de l’exercice Zapad 2021 qui prépara l’invasion de l’Ukraine.
Elle a été prolongée par une offensive de désinformation sans précédent cherchant à terroriser les populations et à déstabiliser les gouvernements d’Europe orientale.
Cette neuvième incursion russe dans l’espace aérien polonais depuis 2022, redoublée par la violation de l’espace aérien de la Roumanie par un drone de type Geran le 13 septembre, ne constitue en aucun cas un incident ou une erreur.
Elle est un test adressé à l’Otan, dans la perspective de futures agressions de Moscou contre la Pologne, mais plus vraisemblablement contre les pays Baltes ou la Moldavie. Et l’Alliance a spectaculairement échoué à y répondre.
Sur le plan militaire, seuls quatre drones ont été interceptés par les avions basés en Pologne, soit une performance, indigente par rapport à celles de l’Ukraine et plus encore d’Israël, qui souligne la faiblesse de la défense antiaérienne de l’Europe.
Sur le plan politique, les États-Unis n’ont pas réagi et Donald Trump s’est contenté d’un énigmatique « nous y voici », conditionnant des sanctions contre Moscou à l’arrêt d’achat de pétrole russe par tous les pays de l’Otan.
Sur le plan stratégique, la Pologne a mis en œuvre l’article 4 de l’Alliance prévoyant des consultations, sans que celles-ci aboutissent à une décision ou une riposte concrète.
Poutine, sûr de sa force
Le raid sur la Pologne constitue un ultime avertissement que les Européens devraient prendre enfin au sérieux en sortant du déni qu’ils continuent de cultiver.
Vladimir Poutine confirme qu’il n’entend pas s’en tenir à l’Ukraine mais qu’il poursuit la reconstitution de l’empire soviétique en Europe.
Il exploite pleinement le blanc-seing pour l’extension de la guerre qu’il a reçu, d’un côté, de Donald Trump à Anchorage
– où il a été reçu en ami de l’Amérique et réintégré dans la communauté internationale sans effectuer aucune concession –
et, de l’autre, à Pékin, lors du défilé pour le 80e anniversaire de la victoire sur le Japon, où il s’est assuré le soutien de la Chine, de la Corée du Nord, de l’Iran et des pays du Sud.
Fort d’un régime autocratique qui a éliminé toute forme d’opposition et d’une économie de guerre qui consacre 7,2 % du PIB à la défense et produit désormais 1 500 chars, 60 000 drones kamikazes à longue portée, 2 350 missiles balistiques et de croisière ainsi que plus de 3 millions d’obus par an, Vladimir Poutine est sûr de sa force et estime que le temps joue pour lui, en Ukraine comme en Europe.
Deuxième enseignement, la garantie de sécurité des États-Unis – pour laquelle Ursula von der Leyen a sacrifié les entreprises et la souveraineté européennes – relève de la grande illusion.
En Pologne face aux drones russes, comme au Qatar face à l’aviation israélienne, les États-Unis sont restés non seulement passifs mais impuissants voire complaisants envers les agresseurs.
Les États-Unis de Donald Trump ne disposent plus ni d’une crédibilité internationale ni d’une stratégie cohérente, quand bien même leurs moyens d’action demeurent considérables.
Leur alignement sur les principes des empires autoritaires, l’éclatement de l’Occident et la déstabilisation de l’Otan servent l’impérialisme et l’expansion russes en Europe.
[…]
(Chronique parue dans Le Point du 19 septembre 2025.)
Lire la suite de l’éditorial sur lepoint.fr